Nouvelle Ère – Émergence – Chapitre 26

Budapest, Hongrie, début juin 2006

Même endroit, même heure, même spectacle, même public et même résultat.

Gergõ avait cessé d’insister pour que le magicien se trouvât un domicile plus digne que l’unique loge du cabaret, alors que son cachet devenait plus consistant. Le Hongrois en prenait toujours quarante pour cent mais les soixante pour cent restants étaient loin d’être négligeables désormais. Néanmoins, devant ses refus courtois mais répétés, Gergõ avait obtenu la confirmation de sa première impression : celui qui avait transformé son cabaret miteux en dernier lieu à la mode ne resterait pas.

Aussi, lorsqu’un client – qu’il avait tout de suite remarqué parce qu’il était seul – s’approcha de lui à la fin de la représentation en demandant à s’entretenir avec son magicien, son premier réflexe fut de lui opposer une fin de non-recevoir. Avant de se raviser devant le regard glacé du client en question. Un instant – infime – Gergõ considéra son cabaret, son histoire, son équipe et, saupoudré sur ce bel ensemble, tous les efforts consentis au cours de ces trente dernières années afin de ne pas céder aux sirènes séduisantes de la pègre locale qui trouvait à son établissement des atouts des plus monnayables. L’homme qui lui faisait face et attendait sa réponse avec un sourire aussi froid que ses yeux était capable de faire voler tout cela en éclats, comprit-il dans un accès de lucidité qui le fit se sentir usé. Il n’aurait même pas le temps de réaliser quel genre de malheur lui serait alors tombé sur la tronche.

Il n’afficha pas sa bonne grâce pour autant et invita l’homme à regagner sa place dans la salle, une petite table ronde tout au fond dans un coin sombre. Il allait prévenir le magicien.

* * *

« Quelqu’un veut te voir.

— Qui ?

— Pour ce que j’en sais… » Et Gergõ de hausser les épaules mais il vit bien qu’il était contrarié.

« Tu ne devrais pas le faire attendre, rajouta le Hongrois.

— Qu’est-ce qu’il me veut ? »

Pas plus de réponse qu’à sa question précédente. Il pivota face à son reflet dans le miroir de la loge : dépourvu de son maquillage, son teint habituel, à savoir olivâtre, lui semblait livide sous l’éclat cru des ampoules. Quant à ses cernes habituels qui soulignaient son regard, ils s’étaient à l’inverse mués en deux puits sans fond. Sa chevelure, d’un vert terne qui lui faisait comme une flamme en berne sur le crâne, n’arrangeait pas particulièrement le tableau. Il se sentait vieux ; il savait toutefois que ceux qui croisaient sa route ne lui donnaient pas, en général, plus de trente ans malgré son air sempiternellement fatigué. Une erreur d’appréciation de leur part qu’il avait néanmoins cessé de vouloir corriger. A quoi bon ? On ne le croyait jamais.

« D’accord. J’y vais.

— Dis… – Gergõ avait posé une main sur son bras pour le retenir au moment où il passait devant lui – si tu pars…

— Pourquoi voudrais-tu que je parte ?

— Je ne sais pas. Une espèce d’intuition, probablement. Bref, je disais donc, si tu pars, essaye d’éviter la concurrence. Ça me ferait mal. »

Au cœur comme au portefeuille. Il comprit le message et sourit, dénudant ses dents blanches dont la pointe d’une canine empiétait légèrement sur la lèvre inférieure :

« Tu n’es pas obligé de me faire confiance mais sache une chose : lorsque je quitte une scène, je quitte la ville qui va avec.

— C’est toujours une consolation.

— Mais je ne suis pas parti.

— Non. Non, bien sûr. »

Bien sûr, songea Gergõ avec mélancolie en le regardant traverser la salle, saluant au passage ceux qui le félicitaient pour sa prestation, en direction de l’homme qui l’attendait droit comme un i sur sa chaise, ses longs cheveux argentés scintillant doucement sous le chiche éclairage.

« Vous voulez me parler, il paraît.

— Bonsoir – l’homme avait relevé la tête et l’observait tandis qu’il restait debout. Je vous en prie, prenez place, rajouta-t-il avec un sourire paisible. Avez-vous dîné ?

— A l’instant.

— J’ai terminé moi aussi.

— Qui êtes-vous ? Demanda-t-il, toujours debout.

— S’il vous plaît : asseyez-vous. »

Le ton de commandement était palpable, il le reconnut immédiatement. Ce fut cette familiarité, plus que l’ordre lui-même, qui l’incita à céder et à s’installer en face de l’inconnu.

« La maîtrise de votre télékinésie est parfaite, je vous félicite.

— Je vous demande pardon ?

— Le nombre d’années que vous y avez consacrées doit être conséquent. Surtout si vous avez tout appris tout seul. »

L’homme n’avait accordé aucune attention à sa question. Il se contentait de le contempler d’un air serein et sûr de lui.

« Qui. Êtes. Vous ?

— Quelqu’un qui sait qui vous êtes et surtout ce que vous êtes. Je m’appelle Alexei Roudnikov, enchanté. » Et de tendre sa main droite devant lui en guise de salutation. D’abord, il hésita puis serra la main tendue. Sans pour autant se présenter à son tour : il resta silencieux.

« Je suis votre parcours depuis cinq ans environ. Ou du moins j’essaie. Vous en êtes à combien de pays ? Dix ? Douze ? Difficile de ne pas vous perdre dès que vous décidez de disparaître. Ce que vous décidez souvent.

— Pourquoi êtes-vous là ? Et qu’est-ce que vous me voulez ? »

Il s’était tassé sur sa chaise, la tête rentrée dans les épaules comme d’habitude. Du coin de l’œil, il surveillait la porte d’entrée, en bas des escaliers. Bon, d’accord, il allait devoir attendre que le restaurant achevât de se vider et que la brigade eût le dos tourné ; il ne lui suffisait toutefois que d’une fraction de seconde d’inattention et il serait loin. Rasséréné par cette idée, il se redressa légèrement, son regard pivotant de nouveau en direction de son interlocuteur qui s’était penché pour saisir dans le sac posé à ses pieds un journal qui dépassait.

« Je savais que vous étiez à Budapest mais j’y ai perdu votre trace dès votre arrivée. Alors il m’a suffi de consulter la presse régulièrement. Après tout, c’est toujours à cause de ce genre d’article que vous disparaissez, n’est-ce pas ? »

Du bout des doigts, Roudnikov fit tourner dans sa direction le journal ouvert à la page divertissements. S’y étalait un compte-rendu de son spectacle, celui au cours duquel il avait fait monter Magda sur la scène : une photo de celle-ci allongée à un mètre du sol avec lui à côté illustrait l’article.

Sa paupière droite tressauta et il se frotta les yeux pour masquer sa contrariété.

Merde. Merde, merde et merde !

Les appareils photos étaient strictement interdits dans l’établissement. C’était sans compter la nouvelle génération de téléphones portables aujourd’hui tous équipés de dispositifs de prises de vue suffisamment évolués pour permettre ce genre de cliché volé. Il n’avait rien vu.

« Et maintenant, qu’allez-vous faire ? Vous enfuir une nouvelle fois ? Pour aller où ?

— Ça ne vous regarde pas, souffla-t-il, le regard toujours rivé sur l’article.

— Combien de temps comptez-vous continuer à vivre de cette façon ?

— Je viens de vous dire que ça ne vous regardait pas ! »

Il avait levé le ton, ce qui ne lui arrivait jamais. Les mains tremblantes, il froissa le journal et le jeta au sol tout en se levant :

« Partez. Je veux rien avoir à faire avec vous.

— Vous ne savez même pas pourquoi je suis là.

— Et je m’en fiche ! Vous ne savez rien de moi, rien du tout ! Allez-vous en, ou je demande aux vigiles de vous faire sortir.

— Ils peuvent toujours essayer », répondit Roudnikov d’une voix tranquille tout en appuyant son dos plus confortablement sur son siège et croisant les jambes sur le côté de la table. D’un signe du menton, il désigna le journal en désordre qui gisait sur le sol. Le magicien suivit son regard. Le papier se désintégra en moins d’un centième de seconde tandis qu’un courant d’air froid remontait pour lui brûler le bord des paupières. Il ferma les yeux mais pas assez vite pour ne pas apercevoir un mince halo couleur de givre trouer les ombres et environner la silhouette de l’homme en face de lui.

« Je suis comme vous, répondit Alexei à sa question informulée. Et vous savez aussi bien que moi de quoi il s’agit.

— Le cosmos. »

Lentement, ses poings se serrèrent le long de ses cuisses et il se rassit. Peut-être n’allait-il pas attendre le moment favorable, finalement. Après tout, qui pour le retrouver ? Qui pour le suivre alors qu’en un clin d’œil il pouvait se retrouver à des milliers de kilomètres de là s’il le souhaitait ?

« Ne faites pas quelque chose que vous pourriez regretter.

— Ce que je pourrais regretter, c’est certainement de rester ici plus longtemps avec vous.

— Qui croyez-vous donc que je suis ? »

L’homme avait penché la tête de côté et l’observait avec curiosité et aussi, oui, une sorte de compassion diffuse à son égard. Il comprit tout à coup qu’il ne la voyait pas mais qu’il la ressentait, tout comme il percevait souvent les sentiments et les réactions de ceux et celles qu’il faisait monter sur scène avant même que les principaux intéressés en eussent pris conscience.

Il hésita. Tourna de nouveau la tête vers la sortie. Revint vers l’étranger.

« Le Sanctuaire…

— Non. Je n’ai rien à voir avec eux. A dire vrai, ce serait plutôt tout le contraire. »

* * *

Alexei vit son vis à vis se raidir sur sa chaise et perçut sa tension galopante. S’il n’y prenait pas garde, l’autre se volatiliserait sans crier gare et il le perdrait, une fois de plus. Ce qu’il ne pouvait pas se permettre.

Il choisit de maintenir son cosmos à un niveau minimum mais non nul. Si l’homme était rapide, ainsi qu’il avait pu s’en rendre compte au fil des années, il ne l’était pas autant que lui. Peu pouvaient se targuer de l’être. Il saurait, cette fois, le retenir en cas de nécessité.

L’autre ne le savait pas mais cela faisait des années qu’il avait été identifié. D’abord par Dimitri, puis Alexei avait pris le relais, s’efforçant de conserver sa piste malgré l’indiscutable volonté de l’individu de ne pas – jamais – se fixer où que ce fût ou de s’attacher à qui que ce fût. Il l’avait d’abord considéré comme tous les autres, comme tous ceux susceptibles de rallier un jour leur cause : un être doté de cosmos dont le Sanctuaire n’avait pas voulu. Ceux que ce dernier n’avait pas identifiés étaient infiniment plus rares, même s’ils existaient : Alexei en constituait la preuve criante. Au fil du temps toutefois, le Russe s’était pris d’un intérêt particulier pour le personnage et son obsession. Pourquoi s’acharner ainsi à sans cesse disparaître ? D’où puisait-il cette volonté farouche de ne pas exister ? De tous ceux dotés d’un cosmos plus ou moins dompté, plus ou moins entraîné, il était le seul à maîtriser le sien avec un art consommé et à ne l’utiliser que dans un cadre qu’il s’était lui-même fixé sans jamais en déborder.

« Dans ce cas, c’est encore pire. »

Les mains cachées sous la table, les épaules resserrées au maximum comme s’il espérait qu’ainsi on ignorât sa présence, l’homme avait marmonné entre ses dents.

« Pourquoi dites-vous cela ?

— Parce que cela signifie que vous utilisez votre cosmos comme bon vous semble.

— N’est-ce pas votre cas également ?

— Non. »

La réponse était sèche et tranchante.

« Pourtant, tout ça… » Le bras d’Alexei se déploya pour englober la salle, à présent vidée de ses derniers clients.

— Ça n’a rien à voir. Je ne fais de mal à personne.

— Je ne suis pas certain que le Sanctuaire partage votre point de vue. »

Le doute traversa les yeux étroits et fatigués de l’homme :

« Si vous savez que j’existe, alors le Sanctuaire également. S’il avait voulu mettre un terme à « tout ça » comme vous dites, il l’aurait déjà fait depuis longtemps.

— Vous les surestimez. Et surtout, vous vous trompez si vous pensez qu’ils se préoccupent encore de vous. »

Touché !

Une infime crispation dans la nuque de l’homme se propagea jusqu’à sa mâchoire dont l’os déforma brièvement sa joue glabre.

« S’ils n’ont pas voulu de vous, poursuivit Alexei d’une voix douce, c’est que vous ne présentiez aucune valeur à leurs yeux. Pourquoi leur avis à votre sujet aurait-il changé depuis tout ce temps ? »

Le regard de biais du magicien se fit tour à tour ombrageux, triste, puis résigné. Alexei prit alors conscience que cette résignation imprégnait tout entier l’être qui lui faisait face.

« Vous avez raison, je ne sais pas grand-chose à votre sujet. Tout juste qu’enfant, vous avez été envoyé au Sanctuaire où vous êtes resté un peu plus de deux ans avant d’être renvoyé là d’où vous veniez. Un orphelinat dans le Caucase si mes renseignements sont exacts. Par contre, je confesse mon ignorance en ce qui concerne les raisons pour lesquelles il a été décidé de ne pas vous garder.

— Je ne les connais pas non plus. »

La réponse avait jailli, impulsive et spontanée, comme sous l’effet d’une pression trop longtemps contenue.

« Je… Il ne m’a pas expliqué. Il m’a simplement dit que ce ne serait pas possible. Qu’il y avait cru mais qu’il s’était trompé. Et puis je suis parti.

— Il ?

— Le Grand Pope. »

Shion lui-même l’avait renvoyé ? Alexei s’efforça de dissimuler sa surprise mais l’autre homme s’était bien trop abîmé dans ses souvenirs et ne le regardait même plus.

« Je savais qu’on pouvait être renvoyé, c’est la première chose qu’on vous dit quand vous arrivez. Il y a des règles à respecter, des comportements à adopter. J’ai respecté toutes les consignes. J’ai fait tout ce qu’on m’a dit de faire. Et je… j’étais doué. »

Les yeux dans le vide, l’homme se balançait lentement sur sa chaise.

« Je n’avais que sept ans mais je savais déjà contrôler des objets et des êtres vivants. Et me déplacer, aussi. J’ai appris très vite parce que je me suis rendu compte que je faisais peur aux autres, alors… Je ne voulais pas les effrayer. Ce pouvoir, je ne l’avais pas demandé. Je suis né avec, c’est ce qu’il m’a expliqué au début et il avait l’air content que ce soit le cas. Et puis… »

Gergõ les observait depuis le bar à l’entrée de la salle, les bras croisés comme à son habitude. Autour de lui, un serveur passait un dernier coup de balai et les lumières s’étaient toutes éteintes à l’exception de l’endroit où il se tenait, et du fond de la salle où les deux hommes étaient toujours installés.

« On va fermer, lança-t-il d’un ton rogue.

— Nous avons presque terminé, répliqua Alexei.

— Vous ne m’avez pas bien…

— Si. Si, j’ai très bien compris. »

Gergõ leva les yeux au plafond avec un soupir et fit signe au serveur :

« Vas-y, tu n’as qu’à rentrer chez toi, je m’occupe du reste. »

Quand, c’était une autre histoire par contre.

La voix du Hongrois avait néanmoins contribué à sortir le magicien de sa transe et relevant la tête, il se confronta de nouveau à Alexei. Malgré la pénombre, ce dernier le détailla à l’aune de ce qu’il venait de découvrir et petit à petit, une révélation à côté de laquelle il était totalement passé se fit jour dans son esprit : les traits de cet homme, si juvéniles par rapport à son âge, sa pilosité peu développée et surtout, surtout, ses capacités si particulières…

Non, ne me dites pas que…

« Avez-vous connu vos parents ? Demanda Alexei, mu par une inspiration subite.

— Non. Ou en tout cas, je ne m’en rappelle pas. Dans mes souvenirs, il n’y a jamais rien eu d’autre que l’orphelinat.

— Et lorsque vous y êtes revenu – vous aviez, quoi : neuf ans ? Dix ? – que s’est-il passé ? »

L’homme haussa les épaules :

« J’y suis resté jusqu’à mes quinze ans. Ils n’ont pas réussi à trouver de famille que j’aurais pu intéresser. On m’a dit que mon apparence posait problème : je ne ressemblais à aucun des autres enfants qui étaient là. Après, je suis parti. »

Après, il a commencé à fuir.

« Pendant toutes ces années, vous avez utilisé votre cosmos pour survivre sans faire de mal à quiconque et en cela, vous avez respecté les règles du Sanctuaire.

— Non, pas toutes : la première d’entre elles est de ne jamais utiliser son cosmos à des fins personnelles », répliqua l’homme, le dos arrondi contre le dossier de la chaise, ses mains enfin réapparues sur la table. Sous la pointe de son index, une petite cuillère tournait sur elle-même sans qu’il la touchât. « Pour cette infraction, le Sanctuaire serait fondé à m’éliminer.

— C’est pour cette raison que vous fuyez ?

— Entre autres.

— Vous avez le droit d’être ce que vous êtes, vous savez, dit doucement Alexei. Pleinement et entièrement le droit. Vous avez aussi et surtout le droit d’agir et de vous comporter en étant fier de ce que vous êtes. Rien ni personne n’est fondé à dicter votre conduite, sous prétexte de contrôler votre cosmos.

— Personne ne me contrôle.

— Si. Vous-même. Depuis toutes ces années, vous vous censurez et vous vous punissez d’être ce que vous êtes. Vous vous empêchez de vivre votre vie parce que vous vous êtes persuadé que les seules règles applicables sont celle du Sanctuaire, ce même Sanctuaire qui s’est débarrassé de vous parce que vous « ne faisiez pas l’affaire ». Si c’était le cas, pourquoi en respecter l’autorité puisqu’ils ont décidé qu’elle ne pouvait s’appliquer à vous ? Qu’est-ce qui vous oblige, aujourd’hui, à vivre selon leurs exigences ? »

L’homme papillonna, désarçonné. La cuillère s’était figée au centre de la table, manche vers le haut.

« Nous sommes nombreux, plus nombreux que vous l’imaginez, à vivre avec un cosmos éveillé de par le monde. Il existe des centaines de gens comme vous et moi, des milliers sans doute. Certains n’en ont aucune conscience ; d’autres doivent se débrouiller avec. Dans les deux cas, le cosmos fait partie d’eux, il est eux et eux sont le cosmos. Demander à ces gens de vivre sans leur cosmos reviendrait à leur demander de se couper un membre. Ou d’arrêter de respirer. C’est pourtant le droit que s’est arrogé le Sanctuaire, un droit qu’il se considère libre d’appliquer comme et à qui bon lui semble depuis plus de deux mille ans sans avoir de compte à rendre à quiconque. Depuis des siècles, le Sanctuaire décide unilatéralement de qui a le droit d’utiliser son cosmos, et de qui doit en être privé. Je comprends votre volonté de le fuir : ses châtiments peuvent être terribles. Mais au nom de quoi peuvent-ils s’accorder un tel pouvoir sur le destin d’autrui ? Et pourquoi devrions-nous le tolérer ?

— Parce que nous sommes dangereux. Vous, moi, et tous les gens qui sont comme nous.

— Dangereux pour qui, exactement ? Et pourquoi ? Notre usage du cosmos n’est pas automatiquement synonyme de dommage à autrui. Contrairement, d’ailleurs, à l’usage qu’en fait le Sanctuaire puisque ses membres ne doivent l’employer que dans des circonstances bien précises visant en théorie à protéger l’humanité. En quoi faisant ? En employant la force. Ce n’est pas ce que nous voulons.

— Nous ?

— Oui, nous, ceux et celles qui ont décidé de s’unir pour démettre le Sanctuaire de ses prérogatives et pouvoir enfin vivre librement, sans peur et sans honte d’être ce que nous sommes. »

Son discours était rodé, par la force des choses. Pourtant, face à cet homme perdu et foncièrement bon – il le devinait sans peine – sa volonté de convaincre s’était réaffirmée. Pour une raison qu’il ne s’expliquait pas, il avait envie que cet homme les rejoignît, au-delà de son utilité. S’il était convaincu par le bien-fondé de la démarche initiée par Dimitri Dothrakis, il ne se sentait pas non plus l’âme d’un sauveur. En l’occurrence, toutefois, il ne supportait pas l’idée que celui qui lui faisait face et dont il avait déjà deviné la réponse, continuât à fuir parce qu’il se considérait comme un raté ou un monstre, au choix, alors qu’il n’avait pas choisi son destin. Lui, moins que quiconque.

« C’est pour ça que vous êtes là ? Pour me demander de vous rejoindre ?

— Oui. Nous nous préparons depuis des années dans ce but et tous ceux qui veulent nous aider à l’atteindre sont les bienvenus.

— S’opposer au Sanctuaire ne se fera pas sans combattre, objecta l’homme qui s’était sensiblement redressé entre temps.

— C’est vrai, même si nous avons prévu de tout mettre en œuvre pour ne pas en arriver à de telles extrémités.

— Et si malgré tout, il le fallait ?

— Dans ce cas… – Alexei hocha la tête – alors nous nous battrons. »

L’homme se drapa dans un silence méditatif qu’Alexei choisit de respecter. En s’alliant aux Enfants du Cosmos, son vis-à-vis devait tourner le dos aux convictions qui l’animaient depuis près de quarante ans. Des convictions certes artificielles qui devaient tout à ce que le Sanctuaire lui avait fait entrer de force dans le crâne, mais des convictions tout de même. L’exercice n’avait rien d’aisé.

« Je ne me suis pas présenté, dit enfin l’homme, en tendant cette fois lui-même une main à Alexei.

— C’est inutile, je sais depuis longtemps qui tu es, Spartan. »

Temple du Verseau, Sanctuaire, Grèce, mi-juin2006

Son mug de café entre les mains, Camus leva le menton brièvement, un sourire lumineux en travers du visage. Curieux, Milo se pencha en travers de la fenêtre devant laquelle le Verseau se tenait : il aperçut Shura quelques volées de marches plus bas, en train de regagner son temple après son running quotidien. A son tour, le Grec le salua d’un geste de la main auquel le Capricorne répondit avant de disparaître aussitôt par l’entrée de service de ses appartements.

« On ne l’a pas beaucoup vu ces derniers jours, commenta Milo, le dos et un pied appuyés contre le mur à côté de l’ouverture par où s’engouffrait une brise matinale mais déjà tiède.

— Il passe pas mal de temps aux archives, de ce que j’ai cru comprendre.

— Qu’est-ce qu’il y fait ? »

Pour toute réponse, Camus haussa les épaules, son regard couleur de glace dérivant à la surface du Domaine Sacré. Bien qu’il eût décidé de rester au Sanctuaire après le mariage de Kanon et Thétis, Shura n’était pas le seul à se tenir à l’écart de ses pairs ; Camus l’imitait d’une certaine façon en gardant son esprit à l’abri de toute intrusion malencontreuse. Milo, qui avait sagement pris l’habitude de ne pas s’y aventurer sans y être invité ne s’en serait pas formalisé plus que nécessaire si cette attitude ne s’accompagnait pas depuis quelques jours d’un air préoccupé qui durcissait les traits purs de son ami. Compagnon. Partenaire. Amant. Enfin, un peu tout ça en même temps mais sans délimitation claire.

Sentant ses réflexions lui échapper sur un chemin qu’il ne se sentait pas le courage d’arpenter de si bon matin, le Scorpion se reconcentra sur le visage de Camus tout en plongeant son nez dans sa propre tasse. Qu’est-ce qui pouvait bien miner le Français à ce point ? Il était censé lui poser la question ou plus précisément, il aurait déjà dû le faire. Pourtant, il ne se décidait pas. Et si Camus avait surpris dans sa tête ce qu’il n’était pas autorisé à lui dévoiler ? Et qu’il lui en voulait de son silence ?

Une fois de plus, bien à l’abri derrière ses remparts mentaux – du moins l’espérait-il – Milo se surprit à maudire Saga. Leur demander de se taire, à Aldébaran et lui, en plein cœur du Domaine Sacré alors que dans le même temps, certains de leurs camarades avaient décidé d’y demeurer pour un temps au lieu de retourner dans leurs pénates, relevait de l’impossible. Certes, impossible et chevaliers d’or dans la même phrase était antinomique au possible mais enfin, après ce qu’ils avaient vécu et été obligés de partager – y compris et surtout ce qu’ils ne voulaient pas – difficile de revenir en arrière. Sauf à consentir des efforts considérables.

« Ça va être compliqué », avait prophétisé le Grec presque trois semaines plus tôt en quittant le palais aux côtés d’Aldébaran. Le pas de celui-ci était plus lourd encore qu’à l’accoutumée et un profond soupir avait ponctué sa réponse résignée :

« Ça ne durera pas. Ça ne pourra pas durer, de toute façon.

— Je ne suis pas sûr de réussir. Camus… Enfin, tu vois.

— Je t’aiderai. »

Le cosmos du Taureau avait alors réagi en contrepoint de celui du Scorpion qui avait hoché la tête, rasséréné en dépit de l’étrangeté de la sensation que cette mise en résonance induisait à chaque fois dans son corps et ses pensées. L’espace d’un instant si fugace qu’il croyait toujours l’avoir imaginé, il expérimentait une impression de ne plus s’appartenir à lui-même. Une situation assimilable à un danger mais qui dans le même temps ne lui était pas si déplaisante. Il s’était alors forcé à sourire :

« Toi au moins tu as de la chance : Ilona ne peut pas lire tes pensées.

— Ilona ? Mais pourquoi tu me parles d’elle tout à coup ? S’était empourpré Aldébaran.

— Eh mais… Le rouge te va plutôt bien au teint ! » Et le Grec hilare d’esquisser de justesse le tranchant d’une main massive tout auréolée de cosmos qui n’avait intercepté au final que quelques boucles d’un bleu profond, emportées par le vent.

La présence vigilante d’Aldébaran, peu rancunier, ne s’était pas démentie depuis et le Scorpion avait avantageusement profité de la sécurité supplémentaire de son cosmos pour préserver avec soin le secret des derniers événements. Toutefois, le sens de l’observation et la perspicacité de Camus n’étaient pas les dernières de ses qualités et Milo commençait sérieusement à se demander s’il n’avait pas failli à sa promesse. Aussi, quand le Verseau ouvrit finalement la bouche, il se surprit absurdement à fermer les yeux, dans le cas où ses oreilles auraient l’heureuse idée de les imiter.

« J’ai revu Dôkho hier soir. »

In extremis Milo retint, puis contrôla la bouffée de soulagement qui fila discrètement entre ses lèvres entrouvertes, avant de sentir dans le même temps ses oreilles s’échauffer de honte sous ses cheveux qu’il n’avait pas pris la peine de nouer dans sa nuque ce matin-là. Il se serait battu s’il l’avait pu ; en l’espèce il se contenta de s’insulter copieusement en son for intérieur, tout en relevant la tête pour regarder le Verseau. L’évidence lui sauta alors à la figure mais il venait d’épuiser son stock d’auto-imprécations.

« Il n’a même pas réussi à me serrer la main. »

Les sourcils de Camus se foncèrent et la clarté de ses iris se voila alors qu’il se tournait vers le Scorpion :

« C’est bientôt fini, Milo. »

Un froid, qui devenait familier à force de se faufiler le long de son échine dès lors qu’il songeait à Dôkho, descendit dans les os du Scorpion. La réalité de la disparition prochaine de la Balance se faisait plus prégnante chaque jour et cette perspective peu enthousiasmante avait décidé Shura, Mü, Shaka et Aioros à ne pas quitter le Sanctuaire. Pourquoi faire ? Ils allaient devoir y revenir plus tôt que prévu. Bien plus tôt. Quant à Angelo, Aiolia et leurs compagnes respectives, personne n’avait pris la peine de se réjouir de les revoir bientôt. Et eux non plus.

Sans un mot, Milo quitta le mur contre lequel il était adossé pour aller poser sa tasse vide sur la table, tandis que Camus allumait une cigarette. Le Grec se surprit à savourer l’odeur de la fumée qui dériva dans la pièce, lui qui était à l’origine du vice duquel le Verseau n’envisageait toujours pas de se dépêtrer. Il se rappelait avec nostalgie de ses premières cigarettes mais sans les regretter pour autant ; il s’en était vite lassé, contrairement au Français.

Revenant vers l’autre homme, il se posta derrière lui, un bras enroulé autour de ses hanches, et son nez enfoui dans les longues mèches couleur d’océan. Camus affecta de ne pas bouger ; son poids cependant s’accentua – très – légèrement contre le torse du Scorpion qui murmura :

« Nous savons – il sait qu’il ne peut pas gagner ce combat-là. Ça ne l’empêchera pas de se battre jusqu’au bout, comme il l’a toujours fait.

— Il y est, au bout.

— Nous serons là.

— Mais lui ne le sera plus. »

La poitrine du Verseau s’enfla avant que son soupir cascadât dans le silence.

« Tu as songé à l’après ?

— … Oui. »

En première intention, Milo avait voulu répondre par la négative mais il avait assez de choses à cacher comme ça en ce moment pour ne pas en rajouter. Même anticipée, la douleur n’en était pas moins difficile à supporter et son ton se fit rauque alors qu’il rajoutait :

« Je n’avais jamais imaginé que l’un d’entre nous puisse disparaître. Je sais, c’est idiot. Depuis j’ai admis que ça peut – que ça va arriver et je me rends compte qu’au fond, je n’ai pas la moindre idée de ce que ça signifie, hormis…

— Hormis ? »

La tête de Camus avait pivoté et les lèvres de Milo se retrouvèrent contre sa joue.

« … Hormis que désormais, je vais devoir vivre amputé d’une partie de moi-même. De nous tous. Et que je ne sais pas comment y parvenir. »

Le Verseau s’était figé. Puis, lentement, il se retourna tout à fait pour faire face à son compagnon qui décela de la reconnaissance dans son regard. Il leva les sourcils, étonné :

« Qu’est-ce que j’ai dit ?

— Merci. »

Cette fois tout à fait confus, Milo secouait doucement la tête que Camus immobilisa entre ses mains, avant d’appuyer brièvement des lèvres tièdes contre les siennes puis de relâcher son visage. Seul son front demeura contre celui du Scorpion, ses yeux rivés au sol. Ils cillèrent quand Milo referma avec douceur sa main sur son poignet ballant entre eux.

« Je craignais d’être le seul à me poser ces questions.

— Le seul à les exprimer à haute voix, tu veux dire. Nous ne sommes pas prêts, rajouta Milo après un silence morne. Aucun d’entre nous ne l’est. »

Et les dieux seuls savent comment chacun va réagir.

Cette certitude peu engageante tira un frémissement au Grec dont les doigts se resserrèrent sur la main de l’autre homme.

« Milo ? »

Ce dernier ne s’était pas rendu compte de la force imprimée à son étreinte comme il s’abîmait dans un pressentiment aux tréfonds singulièrement obscurs. S’ébrouant à l’énoncé de son prénom, son regard accommoda pour plonger cette fois dans la clarté pure de celui du Verseau. Cette vision l’apaisa comme Camus l’observait avec attention, la tête légèrement penchée sur le côté.

« Désolé, je… Non, rien, fit le Scorpion, avec un mince sourire d’excuse. C’est sans importance.

— Vraiment ?

— Je l’espère. »

Sanctuaire, Grèce, Juin 2006

Le soleil déjà chaud illuminait un ciel sans nuage. On se serait cru en plein mois de Juillet, songea Aldébaran tout en plissant les yeux depuis la marche la plus haute de son temple, pour tenter de distinguer le propriétaire de la haute silhouette dégingandée qui venait d’apparaître en haut de la falaise, à l’entrée du chemin menant au Domaine Sacré.

Il ne l’avait toujours pas reconnu, du point de vue physique en tout cas, mais la perception du cosmos du nouvel arrivant pallia l’insuffisance de sa vue qui baissait graduellement d’année en année :

« Jamian du Corbeau », le salua-t-il avec une brève inclinaison de la tête et un sourire, une fois qu’il se fut porté à sa rencontre, sur le vaste parvis qui précédait le temple du Bélier et l’Escalier.

Pour sa part, le chevalier d’Argent se fendit d’un ersatz du salut qu’il devait à son supérieur hiérarchique. A peine son genou ploya-t-il ; son âge lui aurait servi d’excuse si Aldébaran s’en était offusqué ce qui ne risquait pas d’arriver. Les deux hommes se connaissaient depuis si longtemps qu’entre eux, les formalités d’usage avaient fait long feu.

« Aldébaran du Taureau, consentit toutefois l’Écossais. J’espère que tu te portes bien.

— Autant que toi, répondit le Brésilien avec bonne humeur et que l’image souffreteuse savamment entretenue par Jamian ne trompait plus depuis belle lurette. Alors, que nous ramènes-tu ? »

Le chevalier d’Argent se retourna vers le sentier qu’il venait de gravir, toujours vide mais d’où s’élevaient à présent des voix indistinctes et la rumeur de pas malaisés le long de la pente raide et hérissée de rochers.

« Un assortiment disons… singulier », fit-il, sibyllin.

Deux gardes apparurent en premier, suivis de cinq enfants dont les arrières étaient couverts par un troisième garde. Parvenue sur le plateau, la petite troupe s’immobilisa, avant de s’ébranler de nouveau sur un geste impatient du chevalier du Corbeau qui commenta :

« Trois garçons et deux filles. Potentiels variables pour quatre d’entre eux.

— Et le cinquième ?

La cinquième – il haussa les épaules – j’ai été obligé de l’emmener parce que sans elle, l’autre fille ne voulait pas venir. »

Ce qu’on allait en faire n’entrait pas précisément dans les préoccupations de Jamian mais il savait que le Taureau ne le lui reprocherait pas. Ce n’était pas pour rien qu’il avait adressé son compte-rendu à Aldébaran plutôt qu’à Saga. Non qu’il craignît le Pope mais Aldébaran était plus à même de considérer favorablement ses choix.

Les bras croisés, le Taureau procéda à un premier examen silencieux tandis que les enfants approchaient d’un pas hésitant avant de se figer cette fois à quelques pas de lui. Tous avaient moins de dix ans d’après Jamian, bien que deux des trois garçons fussent déjà grands pour leur âge avec de bonnes prédispositions physiques. De prime abord, un cosmos informe et équivalent accompagnait chacun des garçons mais le Corbeau avait raison : le potentiel à y associer n’était pas identique pour tous. C’était toujours ça de pris toutefois, jugea Aldébaran qui leur adressa un sourire assez rassurant pour qu’ils se détendissent quelque peu et risquassent un coup d’œil circulaire autour d’eux. Leurs yeux s’agrandirent devant le Domaine Sacré qui déployait sur le flanc de Star Hill ses douze temples fraîchement rénovés, tout en blancheur aveuglante sous le soleil matinal ; Jamian ne put retenir un petit rire sec, malgré l’habitude :

« Tous pareils, ces gamins.

— Ce sont ces deux-là, les inséparables ? »

Aldébaran pointa du menton les deux petites filles, toujours plantées devant lui alors que leurs trois camarades avaient commencer à s’égayer d’un pas prudent sur l’esplanade sous le regard vigilant des gardes.

« Comment as-tu deviné ? » Répondit Jamian non sans une pointe d’ironie.

Collées l’une à l’autre, leurs mains étroitement nouées entre elles, elles ne bougeaient pas d’un millimètre. Mais alors que l’une – à la chevelure de feu – fixait des yeux d’un vert printanier à la fois curieux et effrayés sur le colosse qui lui rendait son regard, l’autre gardait baissée une tête aussi brune que la nuit la plus noire.

« Laquelle ? Demanda Aldébaran.

— Celle de gauche, là. »

Le Brésilien fronça ses sourcils broussailleux. Étrange. Sur le moment, il n’avait pas ressenti grand-chose et avait cru que l’infime vibration perçue provenait de la rouquine mais à la vérité, il commençait à se rendre compte que c’était l’autre enfant qui projetait tout azimut des vagues d’un cosmos aussi intense que brut, qui refluaient cependant aussi vite qu’elles s’étaient déployées.

« Je t’avais prévenu », rajouta Jamian d’une voix traînante.

« Par tous les dieux, qu’est-ce que c’est encore que cette bande de bras cassés que tu nous ramènes, Jamian ? »

L’interpellé leva les yeux au ciel avec un soupir exagéré :

« Algol. Cela ne fait pas assez longtemps pour que tu m’aies manqué.

— J’en ai autant à ton égard, rassure-toi.  Seigneur du Taureau. »

Le salut de Persée fut impeccable, sous l’œil aigu d’Aldébaran qui ne décroisa pas les bras pour autant.

Algol entreprit de faire lentement le tour des deux fillettes qui se rapprochèrent l’une de l’autre, si tant était que ce fût encore possible. Ou disons que la rousse attira contre elle la brune qui se laissa faire avec une passivité qui tira une grimace à Aldébaran tandis que Persée commentait, goguenard :

« Eh bien de toute évidence, cette fois tu t’es surpassé mon ami.

— Je ne suis pas ton ami.

— Façon de parler. Celle-ci – Algol désigna d’un index négligent l’enfant aux yeux verts – ne présente aucun intérêt : pas la moindre étincelle de cosmos à l’horizon. Quant à celle-là… »

Le rire du chevalier d’Argent, chef de la garde du Sanctuaire, se fit méprisant :

« Ce n’est pas un cosmos qu’elle a, mais une vieille serpillière pleine de trous ! Ah, Jamian – Persée tapota l’épaule de son pair d’une main compatissante – tu te sens donc si seul qu’il ne te faille rechercher que des gens qui te ressemblent ?

— Chevalier de Persée, il me semble que le renforcement de nos défenses nord est au programme aujourd’hui. »

Le ton d’Aldébaran était suffisamment neutre pour qu’Algol se raidît brièvement :

« En effet. Bonne journée à toi, chevalier du Taureau. »

Tandis que Jamian considérait pensivement la silhouette athlétique d’Algol en train de s’éloigner d’un pas alerte, Aldébaran reportait son attention sur les deux fillettes, de toute évidence au bord de la panique désormais.

« Ne vous inquiétez pas. »

Après avoir posé un genou à terre devant elles, il poursuivit d’une voix apaisante et en anglais ce qui eut le mérite d’attirer de nouveau l’attention de la petite fille rousse, un éclair de compréhension traversant ses grands yeux de jade tandis que Jamian hochait la tête, approbateur :

« Vous ne risquez rien. »

Timidement, l’enfant acquiesça en silence. A côté d’elle, sa camarade demeurait inerte, si ce n’était ses doigts aux phalanges blanchies que d’être agrippés à ceux de son amie.

« Jamian, aussi désagréable soit-il Algol n’a pas tort, reprit Aldébaran en grec cette fois, son cou massif pivotant en direction de l’Écossais. Je reconnais que cette enfant est dotée d’un cosmos puissant mais…

— Il est inexploitable en l’état. »

Les deux chevaliers avaient perçu la perturbation dans la trame de l’espace-temps, un instant à peine avant que celle-ci ne se déchirât pour laisser le passage au Pope. Cette fois, le Corbeau sacrifia au règlement et se cassa en deux plutôt qu’il ne se courba devant Saga qui lui fit signe de se redresser d’un geste de la main.

« On le perçoit à des kilomètres pourtant, poursuivit Saga, l’air aussi perplexe que celui d’Aldébaran. Jamian, où et comment l’as-tu trouvée ?

— Dans le nord de la France, à Calais. C’est le directeur d’un orphelinat qui nous a contactés. »

Le Sanctuaire avait, depuis des siècles, tissé de par le monde une toile complexe aux mailles étroites dont l’un des principaux objectifs consistait à intercepter tout potentiel cosmique susceptible de contribuer à ses effectifs. A cet effet, plusieurs critères discriminants entraient en ligne de compte dont le premier, et le plus ancien, était de privilégier les orphelins afin que nul ne se formalisât si leur destin tournait mal, une possibilité aux statistiques non nulles dès lorsqu’on dédiait sa vie au Sanctuaire. Les conditions cependant avaient évolué avec la société et depuis près de deux siècles à présent, de plus en plus d’apprentis se trouvaient munis de parents, frères et sœurs et conservaient des liens on ne pouvait plus sains et normaux avec leur famille. La plupart du temps en tout cas car s’ils se retrouvaient au Sanctuaire, c’était bien souvent pour leur apprendre à maîtriser une force qui, dans le cas contraire, les auraient broyés, eux et leurs proches. Les appels à l’aide de ces familles désemparées devant les particularités de leurs enfants qu’elles étaient incapables de comprendre et de gérer finissaient toujours par trouver leur bienfaiteur grâce au réseau en place, constitué indifféremment de médecins, de religieux et de travailleurs sociaux.

Il n’en restait pas moins que la filière orphelinat demeurait la plus prolifique, pour le meilleur comme pour le pire :

« Le père est mort et la mère est internée dans un asile psychiatrique, déclarée inapte à l’éducation d’un enfant, exposa le chevalier du Corbeau dans son grec fortement mâtiné de son accent écossais. Comme il n’y avait personne pour s’occuper de la gamine, elle a été placée en orphelinat par les services sociaux. Sauf que les autres gosses ont commencé à rapporter des histoires assez farfelues à son sujet pour que le directeur commence à se poser des questions.

— Farfelues jusqu’à quel point ? Demanda Saga tout en scrutant les deux petites filles du coin de l’œil, que leurs trois autres compagnons de route venaient de rejoindre bon gré mal gré sous la houlette des gardes qui, devant l’arrivée inattendue de leur Pope, avaient jugé plus sage de regrouper le troupeau.

— Des bruits étranges la nuit en provenance de sa chambre, des objets qui bougent tout seuls en sa présence, voire même des « fantômes » d’après certains, énuméra Jamian en comptant sur ses doigts. Ce genre de détails, quoi. Ce n’est que lorsque le directeur a constaté un matin que la chambre de la gamine avait été ravagée du sol au plafond qu’il a décidé de faire appel au Sanctuaire.

— Je n’ai pas été informé de cette demande », commenta Saga avant de lever les yeux vers Aldébaran qui s’était redressé.

Celui-ci haussa les épaules en écartant les bras :

« Moi non plus, mais ça fait un moment que ce genre de sollicitations ne fait que transiter par ici pour être redirigé vers le chevalier en charge des recrutements le plus proche du pays concerné. D’ailleurs, c’est toi qui as mis cette procédure en place il me semble.

— En effet, admit le Pope après un instant de réflexion résignée. Et donc ?

— Donc… Voilà. »

Jamian désigna la petite fille brune puis l’autre fillette :

« Elle s’appelle Sybil si j’en crois son état civil, et elle est française. Quant à l’autre, c’est Rosalind, et elle est britannique. Pour ce que j’en sais, ses parents habitaient en France et sont morts dans un accident de voiture. Personne n’a été capable de lui trouver de la famille alors elle est restée sur le territoire français. Sybil est la seule des deux qui manifeste un cosmos – du moins d’après ce que j’ai pu constater – mais elle refusait de me suivre sans Rosalind. Alors… – il haussa ses épaules maigres, une attitude qui avait fini par relever chez lui du réflexe au fil des années – … j’ai embarqué les deux. »

Saga reporta de nouveau son attention sur les deux fillettes. Rosalind le fixait avec intensité et l’espace d’un très court instant, le visage enfantin avec ses joues rebondies parsemées de tâches de rousseur, son front bombé et les boucles de cheveux fins qui l’encadraient, lui parut celui d’une adulte. L’impression cependant se dissipa aussi vite qu’elle était survenue comme Jamian poursuivait son récit :

« Je sais bien que son cosmos ne ressemble pas à grand-chose mais… il y a quelque chose à creuser, je crois. Et si au bout du compte on ne peut rien en tirer, au moins on saura l’empêcher de faire du mal à qui que ce soit. »

Le ton de Jamian était sombre et Saga et Aldébaran s’entre-regardèrent : le chevalier du Corbeau avait raison. Aussi capricieux et incohérent était son cosmos, il recelait une puissance sous-jacente pour le moins inquiétante. Peut-être bien à cause cette instabilité, d’ailleurs : serait-elle contrôlable, seulement ? Saga ravala un soupir agacé : il avait déjà plus que son compte de bombes à retardement.

Une cavalcade se fit entendre en provenance du sud et les trois hommes se retournèrent pour voir surgir deux adolescents lancés en pleine course à travers le maquis, le long du muret en pierres sèches délimitant le Domaine Sacré. Derrière eux, un petit groupe tentait de les rattraper, sans succès.

Pilant net devant les adultes, Ethan et Armand choquèrent leurs poings l’un contre l’autre, un air victorieux illuminant leurs visages juvéniles : non seulement ils avaient semé leurs poursuivants sans difficulté mais en plus, ils avaient franchi la ligne d’arrivée d’un même pas, et dans la même seconde. Une ligne d’arrivée artisanale, matérialisée par la démarcation entre les dalles toutes neuves de l’esplanade et la poussière d’où émergeait une végétation maigrelette d’être trop souvent foulée par des pas souvent aussi empressés que les leurs.

Leurs camarades, parvenus à leur hauteur, reprenaient difficilement leur souffle, les mains sur les genoux et couverts de sueur :

« On avait dit sans cosmos ! Protesta l’un d’entre eux, indigné.

— Carrément, renchérit un autre, on veut s’entraîner, pas être humiliés !

— Mais qui vous dit qu’on a utilisé nos cosmos ? Objecta Ethan d’une voix trop suave pour être honnête tandis qu’à ses côtés, Armand jugeait l’extrémité de ses chaussures de course incroyablement fascinante à observer.

— Hé ! Ce sont les nouveaux ? »

Un des garçons vaincus – mais pas le dernier sur la ligne d’arrivée – faufila sa petite taille parmi les autres pour aller se planter aux côtés d’Aldébaran. Ethan et Armand qui avaient salué le Pope puis les deux chevaliers, imités aussitôt par leurs camarades, suivirent son regard :

« Bonjour, fit Ethan avec un grand sourire. Bienvenue au Sanctuaire ! » Ajouta-t-il d’abord en grec puis en anglais ce qui lui valut, comme à l’égard d’Aldébaran tantôt, un regard d’intérêt de la part de la petite fille qui arborait une tignasse aussi flamboyante que la sienne. Armand, prenant exemple, les accueillit à son tour, mais en français. Et pour la première fois depuis qu’elle avait posé le pied sur l’île, l’enfant prénommée Sybil réagit : elle releva la tête.

Ah. D’accord.

Son regard est vide. Saga lui-même ne put réprimer un haut-le-corps, comme à ses côtés Aldébaran étouffait une exclamation. Jamian, pour sa part, demeura stoïque : il avait eu le temps de s’accoutumer à ces yeux sombres et dérangeants que d’être trop ternes, trop morts d’une certaine manière même si leur propriétaire était indéniablement vivante.

Les apprentis, eux, s’étaient tus, d’abord médusés avant d’échanger des chuchotements inaudibles derrière leurs mains en coupe. Le disciple du Capricorne cependant se racla la gorge :

« Je m’appelle Armand, dit-il en tendant la main vers la fillette devant les autres garçons impressionnés par son courage. Et toi ? C’est quoi ton nom ? »

Il n’y eut d’abord qu’un silence, et une immobilité. Puis, lentement, l’enfant leva sa main droite – celle qui n’était pas accrochée à celle de sa camarade – et toucha celle d’Armand. Quoique toucher fût un bien grand mot  ; à peine l’effleura-t-elle sans se départir de son mutisme avant de la retirer aussitôt. Pas assez vite toutefois : une grimace de souffrance déforma brièvement les traits d’Armand qui recula d’un pas.

« Qu’est-ce que… ? »

Ethan s’était avancé, inquiet tout à coup, mais son Pope et maître tendit un bras devant lui pour lui barrer le passage tout en adressant un regard en biais vers le chevalier d’argent du Corbeau :

« Y a-t-il un autre détail que tu aurais omis au sujet de cette enfant ?

— Eh bien… »

Quelques rires interrompirent fort à propos Jamian qui fit mine de s’offusquer de l’insolence de ces enfants qui se permettaient de déranger des adultes en train de parler. Seul Ethan avait été témoin de l’effet du contact physique entre Armand et la petite fille brune ; les autres adolescents entouraient déjà leurs cadets masculins, déboussolés par le grec et l’anglais mêlés avec lesquels on s’adressait à eux. Si ce n’était le ton plus curieux qu’agressif et les sourires dont ils étaient gratifiés, ils se seraient déjà enfuis.

« Vous connaissez le Sanctuaire ? Non ?

— Mais comment veux-tu qu’ils connaissent ?

— Ben c’est facile maintenant, vu que c’est sur Internet !

— Qu’est-ce que tu racontes encore ?

— Quoi, c’est vrai ! Vous savez vous servir d’ordinateurs ? Computers ? »

Le plus petits des apprentis entreprit de mimer des doigts sur un clavier devant des enfants toujours plus désemparés.

« Igor ! »

La voix de stentor d’Aldébaran rebondit soudain contre la montagne avec assez de vigueur pour figer tout le monde. Le jeune Russe, dont les doigts s’étaient brusquement immobilisés dans l’air, entreprit de pivoter sur lui-même, les pieds d’abord, le tronc ensuite, la tête enfin et couina :

« Oui, Seigneur du Taureau ? »

Ce fut cependant le Pope qui s’avança vers Igor dont le cou acheva de se dévisser pour tenter d’apercevoir à grand-peine le visage sévère du Maître du Sanctuaire dont l’ombre le recouvrit tout entier comme sa silhouette immense occultait le soleil :

« Tu ne devrais pas parler sans réfléchir, jeune homme.

— Mais… »

Sa tentative de justification mourut dans sa gorge en même temps que lui revenaient en tête les avertissements d’Aldébaran et qu’un liseré rouge se dessinait autour des iris flamboyants dardés sur lui. Du moins fut-ce ainsi qu’il interpréta et décrivit par la suite le phénomène à ses camarades qui se moquèrent de lui. Cela aurait été pire s’il leur avait dans le même temps fait part de la terreur sans nom qui en cet instant lui liquéfia les entrailles quand la voix de basse du Pope résonna non pas à ses oreilles mais directement dans son esprit :

« Il n’y a pas de « mais ». »

« Retournez à vos baraquements, ordonna Aldébaran, avec un regard lourd de sens à l’attention de Saga qui lui retourna un sourire glacé en guise de réponse. Le premier que je vois lambiner verra sa séance de renforcement musculaire doublée demain matin. Et à jeun. »

La menace était sérieuse ; il s’égayèrent tels une volée de moineaux effarouchés avec une réactivité qui fit glousser Jamian. Le regard de Saga, lui, s’était arrêté sur Ethan et Armand :

« Vous ne vous sentez pas concernés, peut-être ?

— C’est à dire que…

— Tais-toi et viens ! »

Les doigts crochetés autour du biceps d’Ethan, Armand l’entraîna à sa suite avec une courbette d’excuse. Il se retourna néanmoins une dernière fois tout en s’éloignant au petit trot : Sybil avait gardé la tête relevée et semblait le regarder.

Dans leur course pour remonter vers leurs quartiers, les deux apprentis chevaliers d’or croisèrent Ilona. Celle-ci leur adressa un signe ; il ne prirent pas la peine – le temps ? – d’y répondre et ce fut toute interloquée qu’elle arriva à son tour au pied du Domaine Sacré et précisa devant un Aldébaran surpris – mais pas mécontent – de la voir :

« C’est Algol qui m’a dit de descendre. Il paraît qu’il y a des nouveaux arrivants à prendre en charge ? Oh, les voilà ! » S’exclama-t-elle, avec une avalanche de  »r » roulés par la joie en apercevant les enfants qui avaient fini par tous se regrouper, l’air presque aussi hagard que la petite fille brune qui repiqua du nez devant l’attention dont elle était l’objet.

Les mains sur les hanches, elle considéra d’abord les enfants, puis les adultes :

« Qu’est-ce que vous avez bien pu leur dire pour les mettre dans un état pareil, hein ? »

Et de soupirer avec indignation sous le regard attendri d’Aldébaran, blasé de Saga et franchement hilare de Jamian avant d’emmener son petit monde avec elle tout en babillant dans sa langue natale.

« Y a-t-il quelque chose que j’aurais raté en mon absence ? »

Une fois la jeune femme disparue, Jamian avait posé sa question d’un ton léger, que démentait la lueur d’intelligence dans ses yeux globuleux. Un corbeau, posé sur les vestiges d’une dorienne écroulée et dont nul n’avait remarqué la présence jusqu’ici, poussa un croassement interrogateur.

« Trois gardes pour escorter cinq gamins inoffensifs, un second contrôle d’identité au débarcadère – c’est nouveau ? – le renforcement de nos défenses… Ça fait beaucoup pour un Sanctuaire en paix. »

Aldébaran tourna la tête vers Saga qui se refusa à le regarder. Les poings serrés, il répliqua à côté, avec soin et non sans sécheresse :

« Commence par me faire un rapport sur chacune des recrues que tu as ramenées. Et, s’il te plaît : sans omettre les détails. »

10 réflexions sur “Nouvelle Ère – Émergence – Chapitre 26

  1. Gniiiiiiih, les Twix sont déballés ❤

    (Attention par contre, pour ce qui concerne le sort des parents de Sybil, c'est l'inverse 😉 )

    Et chapeau pour Spartan, t'as vraiment l'art de nous dégoter les personnages secondaires les plus obscurs, impossible de deviner que ce serait lui ! (J'ai même du googler son nom pour me rappeler de sa tête !)

    Le suspens continue de s'intensifier ❤

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    • Oui, ils arrivent ! Petit à petit, et même si leur histoire à eux se déroule post Nouvelle Ère, ça y est la nouvelle génération est en marche 😀 Et comme rien n’est jamais gratuit dans cette histoire, leur rôle reste à venir 😉

      Arf, j’avais un doute concernant les parents de Sybil, je vais corriger d’autant que ça a sa petite importance quand même pour l’après.

      J’avoue, me la jouer Okada en déterrant des personnages que tout le monde a oubliés et faire un gigantesque all star game, ça a un petit côté bien kiffant XD Certes, je ne me facilite pas la vie mais en même temps, utiliser des personnages de filler ou créés uniquement pour l’anime (comme Spartan donc), ça reste confortable parce que je peux en faire ce que je veux :3

      Merci beaucoup pour tes gentils mots, et heureuse que cette histoire continue à te plaire ♥

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  2. Hello M’dame !

    Bonne résolution 2024, être plus régulier dans mes commentaires ! 😁

    Alexei continue à jouer les RH itinérants…. comme Mab, j’ai dû chercher pour Spartan…..
    Reste à voir son rôle dans la mauvaise troupe, un modérateur ?
    Celui qui finira par faire le lien entre les Enfants du cosmos et le Sanctuaire ? (une intuition….) ?
    En tout cas, je ne le vois pas en combattant pur.

    Pour les XII, je comprends l’appréhension de Camus, Milo et des autres. La mise en résonnance de leurs cosmos a changé leur vie et leurs relations. Et, ils ne peuvent avoir oublié les mémoires de Bartoléméo du Scorpion….
    Est-ce la disparition de Dohko (et son incapacité à gérer ce « manque ») qui fera replonger Camus dans ses démons ?

    J’avoue avoir été surpris (mais en bien) par l’arrivée des filles (Sybil est mon perso préféré toutes générations confondues).
    Etonnant que Rosa ne manifeste aucun cosmos (Athéna y serait-elle pour quelque chose ?).

    En tout cas, Saga vient de se confronter pour la première à future Némesis (pour reprendre une expression d’un drabble). S’il savait…. 🤣

    Même s’il est absent, Angelo ne sait pas non plus ce qui lui pend au nez….

    Est-ce que côté « psyco-pompe » de Sybil qui a provoqué la réaction d’Armand ?

    Vivement la suite et merci pour ce nouveau et bel opus.

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    • Coucou M’sieur !

      Ca me fait bien plaisir de te voir si vite parmi nous sur ce chapitre ! 🙂

      Alexei a déjà une petite troupe derrière lui (avec des no names dedans parce que ça m’arrange bien XD) mais, oui, il continue à aller chercher ce dont il a besoin. Concernant l’identité de Spartan, j’ai volontairement fait traîner le suspens, il n’y a que Chrysos qui avait trouvé mais les persos ultra-secondaires, c’est sa grande passion XD

      Spartan, on ne sait rien de lui, donc la page était blanche et n’attendait que d’être remplie. Je me suis surprise à trouver le personnage attachant tandis que j’écrivais cette partie alors à vrai dire, je ne suis pas encore totalement décidée sur son sort. Autant, pour certains, les choses sont claires dans ma tête, autant pour d’autres comme lui, je réserve encore ma décision : je vais voir ce que je vais en faire ! 😀

      En effet, tu as raison : les mémoires de Bartolomeo sont encore vivaces dans les mémoires et tous redoutent ce qui va se passer après la disparition de Dôkho même s’ils n’osent pas en parler entre eux, parce que cela reviendrait à rendre tangibles leurs appréhensions. Camus sent déjà que ça va mal se passer mais il ne peut pas encore préjuger de sa réaction, je pense d’ailleurs qu’il n’a pas d’idée préconçue à ce stade parce que dans sa tête, les choses sont assez…. embrouillées. Donc on verra bien !

      Heureuse que l’apparition de la paire Rosa/Sybil t’ait plu ! Je me suis beaucoup amusée à écrire cette partie, d’abord parce qu’écrire sur les silvers, c’était assez inédit pour moi, et puis Jamian est… intéressant XD Concernant Rosa, disons que son échange muet de regards avec Saga parle pour lui-même XD (mais Saga ne le sait pas encore… Le pauvre XD)

      Oui, le « grand amour » entre Saga et Sybil n’en est qu’à ses balbutiements ! 😀 Et Angelo a encore le temps de voir venir (quoique…).

      La réaction d’Armand : n’oublions pas que Sybil est la future Cancer et Armand le futur Capricorne, donc 4ème axe powa ! Le lien cosmique est déjà là ce qui rend Armand plus réceptif que quelqu’un d’autre aux spécificités de Sybil et à ce qu’elle est. Donc, il a probablement perçu quelque chose de pas très joyeux mais quoi… suspens !

      Merci beaucoup pour ton intérêt pour cette histoire, cela me fait vraiment plaisir !

      A bientôt donc 😉

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  3. Ben voilà, je savais bien que c’était lui ! Et en plus, il serait peut-être affilié à un certain peuple disparu. Que d’honneur pour lui !

    Ô joie, tu t’es aussi lâché sur les silvers sur ce chapitre. Il est très bien ton Jamian. Ses interactions avec les nouvelles recrues et l’ancienne garde étaient très sympas. Et Argol est… égal à lui-même.

    On a donc l’arrivée en « fanfare » de Sybil. Au moins elle ne passe pas inaperçue. Vivement la rencontre avec son futur mentor. Qui se ressemble…

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    • Non mais il n’y avait vraiment que toi pour identifier le personnage, bravo ! En écrivant cette partie je me suis surprise à le trouver plutôt attachant, et offrant pas mal de possibilités… De fait, pour l’heure, son destin dans cette histoire n’est pas encore scellé, je me réserve de changer potentiellement mon fusil d’épaule à un moment donné 😉

      Ah les silvers… Un exercice inédit pour moi ! Jamian est top, je me suis éclatée à l’écrire XD J’ai pris le parti de considérer que sa « débilité » et son aspect faiblard dans l’anime ne sont qu’une façade : en effet, si le gars est devenu silver c’est que ce n’est pas un nain et qu’il a reçu une formation en rapport avec son niveau, considérant pour ma part que les silvers sont les lieutenants des golds (idée empruntée à Teshirogi parce que je trouve que c’est une chouette idée et qu’elle offre de la substance au fonctionnement du Sanctuaire). Donc ils sont censés avoir une cervelle, Jamian y compris (n’en déplaise à Shaina XD). Et puis n’oublions pas que les corbeaux sont des oiseaux à l’intelligence redoutable.

      Argol est… oui, voilà, c’est ça XD Mais lui aussi est loin d’être un idiot. Saga l’a nommé chef de la garde, et donc en charge de la sécurité du Sanctuaire dans son ensemble, c’est donc qu’il est compétent et mine de rien, il a une grosse responsabilité sur les épaules.

      Pauvre Sybil ! Alors que justement, tout ce qu’elle veut, c’est passer totalement inaperçue XD Je crois que c’est un peu raté XD Va falloir qu’elle apprenne à faire avec et ça ne va pas être facile. Quant à la tête d’Angelo quand il la verra pour la première fois… :3

      Merci beaucoup, heureuse que ce chapitre t’ait plu ! Comme tu le vois, il y en a pour tous les goûts, c’est mon côté fanbirl. Ou fangoy. Bref, un savant mélange entre les deux XD

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  4. Coucou!

    Intrigant chapitre, avec plein de nouvelles arrivées dont je me demande quel rôle elles vont jouer dans les événements à venir. Ce qui m’a frappée, c’est le fameux magicien itinérant – qui est très fort en psychokinésie? qui fait très jeune pour son âge? qui a des cheveux verts, comme un ancien grand Pope qu’on connaît? – NE ME DIS PAS QU’IL EST ATLANTE?

    On sent par ailleurs que la disparition de Dhoko pèse sur le Sanctuaire comme une épée de Damoclès. C’est sûr que vu les liens qui se sont tissés entre les chevaliers d’Or, ça va créer un gros déséquilibre. Et je dois dire que ça m’inquiète surtout pour ses camarades d’axe, sachant qu’il y en a deux qui sont déjà très mal barrés et un qui broie du noir même quand les choses vont à peu près bien… J’ai un peu peur que ce soit la secousse qui les précipite tous à la mer, en entraînant le reste avec par effet domino! Si on rajoute en plus les barrières affaiblies, les armures disparues, les pirates informatiques et les ennemis dans tous les coins, les prédateurs n’auraient plus qu’à se précipiter pour la curée…

    Bref, wait and see!

    A bientôt!

    Lily

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    • Hello Lily !

      Oui, ça bouge côté personnages dans ce chapitre. J’ai peut-être (sûrement) eu les yeux plus gros que le ventre avec cette histoire, entre les personnages du canon, ceux de l’anime et ceux dont j’ai besoin pour le récit, et ceux qui se sont invités au fil des années, et ceux qui… Bref, au secours ? XD La nouvelle génération est partie intégrante de l’UDC!verse mais ils ne seront pas des personnages importants de NE même s’ils ne sont pas là pour rien. Personne n’est là pour rien, d’ailleurs 😉

      Spartan est très doué en télékinésie, c’est ainsi qu’on nous le présente dans l’anime. Après, il est tout à fait possible de liaisonner ce fait avec des capacités similaires dont semblent doués les Atlantes… A moins que ce ne soit qu’une coïncidence ? Après tout corrélation n’est pas toujours causalité… L’avenir nous le dira :-p

      En effet, la mort prochaine de Dokho risque d’avoir diverses répercussions. Ils le savent tous déjà mais n’ont pas envie d’y songer, ou de l’admettre. Mais une chose est sûre : ça ne va être facile pour personne et chacun va réagir en fonction de sa personnalité et/ou de ses liens avec lui. Le Sanctuaire a déjà commencé à s’affaiblir avec les armures disparues, ça ne va pas aller en s’arrangeant si ses principaux défenseurs perdent pied…

      Merci beaucoup pour ton temps et ton retour sur ce chapitre, heureuse de continuer à t’intriguer avec cette histoire ♥

      A bientôt !

      Al’

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  5. Coucou Al’ !

    Bon alors c’est en voyant la notif cet après-midi pour ton nouveau chapitre que je me suis rendue compte que je n’avais pas encore lu l’avant dernier. Non mais quel oubli impardonnable ! Surtout qu’il est excellent ce chapitre ! Toutes mes excuses, vraiment.

    Et donc oui, j’ai beaucoup aimé ce nouvel épisode de ton récit. En premier lieu parce que l’on découvre plein de nouveaux perso : quelques nouvelles recrues de la jeune génération (dont la future apprentie d’Angelo si ma mémoire ne me fait pas défaut) et Spartan, dont j’ai apprécié l’histoire que tu as imaginée pour lui. Je l’ai trouvé attachant et j’ai eu beaucoup de peine pour lui en apprenant que Shion l’avait plus ou moins renvoyé comme un mal propre alors qu’il n’était encore qu’un gamin. Pour quelle raison ? Parce qu’il ne collait pas à ses plans et n’avait pas de place dans tout ce qu’il avait l’intention de préparer ? Quoi qu’il en soit, j’espère qu’Alexei ne le mènera pas à sa perte en l’intégrant dans sa lutte contre le Sanctuaire. Et en parlant d’Alexei… Une analogie m’est venue pendant la lecture de sa discussion avec Spartan, et je crois que c’est la première fois que je fais un tel rapprochement. En fait Alexeï (et Dimitri avant lui), c’est un peu Magnéto qui essaie de recruter des X-Men déçus de l’école du professeur Xavier 🤣 Pardon pour la comparaison foireuse, mais je ne sais pas pourquoi, cette image s’est aujourd’hui imposée à moi en lisant la discussion entre Alexeï et Spartan.

    Bon et puis tu te doutes que j’ai beaucoup apprécié un passage en particulier dans ce chapitre. L’échange entre Camus et Milo, bien entendu. J’ai trouvé leur complicité très belle à lire, et si je ne savais pas ce qui les attend, j’aurais pu me sentir rassurée en ce qui concerne leur avenir commun à tous les deux. Sauf que, eh ben non. Ragh…  La disparition prochaine de Dohko semble déjà beaucoup les affecter, et quoi de plus normal ! Je n’ai aucun mal à imaginer à quel point cet événement profondément douloureux les marquera tous sans la moindre exception. Sinon très bien vu l’idée du coup de main du Taureau pour aider le Scorpion à préserver le secret de la « Sanctuary Leak ». Parce que sans cela, je ne vois pas comment Camus n’aurait pas pu être au courant. Mais je comprends que Milo se sente mal à l’aise d’être obligé de cacher à son meilleur ami, frère d’arme, pair et amant (un peu tout ça à la fois sans délimitation claire – mais comme j’ai adoré cette petite phrase !!) ce détail qui n’en est pas du tout un. Et là encore, je crains le pire en ce qui concerne la réaction de Camus lorsque celui-ci comprendra que Milo savait et ne lui a rien dit.

    Bon et du coup, je me retrouve à nouveau avec un chapitre à lire dans la foulée de celui-ci. Ce qui encore une fois me fait  presque considérer ma lenteur de lecture comme un mal pour un bien. Même si je me doute que les évènements à venir risquent de ne pas être des plus réjouissants… Mais ton histoire est tellement palpitante que je parviendrai à passer outre ces futures larmes que je risque de verser.

    Merci à toi de partager ton univers avec nous et encore toutes mes excuses pour mon retard (honteux) de lecture.

    J’espère que tu te portes bien.

    Bises,

    Phed’ 

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    • Coucou Phed !’

      Ah là là ce que c’est pratique, les notifs ! 😀 Plus sérieusement, tu n’as pas à t’excuser, l’avant-dernier chapitre était plus long que les autres et on sait à quel point l’IRL est bouffeur de temps et d’énergie. Donc, merci beaucoup d’avoir pris le temps de le lire !

      La next-gen a fait l’objet de plusieurs textes déjà donc tu découvres dans Nouvelle Ere leurs « origines ». D’ailleurs, je serais curieuse de savoir l’effet que ça te fait de découvrir des pans de l’histoire ou des personnages en mode flashforward ? Parce que cette fois, Nouvelle Ere s’écrit dans un contexte très différent d’UDC, du moins pour les lecteurs qui connaissent bien tout l’UDC!verse, en ayant lu les OS comme tu l’as fait. Donc, oui, Sybil est bien la future Cancer.

      J’aime beaucoup Spartan aussi ! Ce personnage qui vient uniquement de l’anime et qu’on voit très peu finalement, je me suis amusée à lui écrire une histoire de A à Z et au fil de la création, il m’a émue. Pour dire toute la vérité, à ce stade de l’histoire je n’ai pas encore décidé de son destin, qui reste entièrement à écrire. Tout va dépendre de tout un tas d’autres facteurs, et de la façon dont eux-mêmes vont évoluer.

      Alors, non, ta comparaison avec l’univers des X-Men n’est pas du foireuse , au contraire ! Je ne suis pas très comics, et pour le peu que je suis, je suis plus familière de l’univers Marvel que de l’univers DC. Ceci étant, parce que je traine mes guêtres un peu partout sur le net depuis des éons, forcément je connais les concepts et j’ai vu quelques films X-Men. Et il y a plusieurs années, le parallèle entre NE (qui s’écrivait dans ma tête) et X-Men m’a sauté aux yeux, au point que j’ai douté de la pertinence d’écrire NE. Il est en outre fort probable que d’une certaine façon, l’univers DC ait « percolé » dans mon inconscient puisqu’on se nourrit de ce qu’on lit/regarde. Ce qui m’a finalement décidée, c’est le fait que le concept s’inscrive dans StS, et dans l’UDC!verse ce qui implique forcément des dynamiques et des interactions différentes. Et je me suis donc dit que ça valait quand même le coup. En tout cas, c’est très bien vu de ta part ! 😀

      Camus et Milo essayent. Toujours. Ils ont envie d’y croire l’un comme l’autre, tout au fond de leur coeur. Et malgré leurs incompréhensions, ils s’aiment. Ce qui rend la suite d’autant plus triste, je suis bien d’accord avec toi… La réaction de Camus reste incertaine lorsqu’il va découvrir que Milo a « menti par omission ». Parce que, bon, paille, poutre, tout ça… XD Mais Milo a aussi menti parce qu’il en a reçu l’ordre. alors forcément, tout n’est pas blanc ou noir dans cette histoire. Sinon, vu que désormais, ils sont tous liés les uns aux autres, ils ont chacun développé des « techniques » pour préserver leurs pensées parce que sinon, il y a de quoi devenir dingue. Donc Milo peut réussir à cacher des choses, tout comme Camus y parvient également. Mais… la frontière est poreuse et si on n’est pas assez attentif ou concentré, une « fuite » est vite arrivée XD

      Un tout grand merci à toi pour ta lecture et ton intérêt toujours aussi vif pour cette histoire, et ses différentes composantes, ça fait vraiment plaisir et c’est motivant ❤

      A tout de suite, pour la réponse à ton second commentaire 🙂

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